Rare birds

Après Appris par corps et Face nord, Alexandre Fray poursuit sa quête des frontières de l’acrobatie.

Six acrobates tentent d’entretenir en permanence un juste déséquilibre.

Oscillant entre le risque de l’excès, de la chute et l’écueil du trop peu et de l’immobilisme, ils marchent, courent, sautent. Ils profitent des obstacles et mettent en œuvre leurs capacités pour les éviter, les détourner, les absorber, bref les transformer et les utiliser. Ils inventent les moyens de rester en mouvement et prennent en main leur évolution.

Des boucles se répètent, cycliques, mais toujours un peu différentes. Toute tentative de conserver un état totalement stable, de s’accrocher à ce que l’on a, même à ce que l’on est, est illusoire. Il n’y a de permanent que la constante transformation. Tant qu’à faire partie de ce mouvement, autant en être acteur. En ce sens, les acrobates font plus que bouger ; leurs gestes sont des actions, des décisions.
Après avoir exploré, avec Face Nord, la lutte et la résistance, Un Loup pour l’Homme part du nouveau postulat que l’acrobate est un homme qui s’adapte. Ce qui importe n’est plus de gagner ou de perdre, mais de perdurer. En un sens, de continuer à jouer.

La compagnie de cirque Un Loup pour l’homme, à travers sa pratique des portés acrobatiques, s’attache à défendre une vision de l’humanité faite d’êtres sociaux, différents autant que dépendants les uns des autres.

La compagnie est née de la rencontre de deux acrobates, le porteur français Alexandre Fray (du CNAC de Châlons), et le voltigeur québécois Frédéric Arsenault (de l’École Nationale du Cirque de Montréal). Empreints de deux créations avec le metteur en scène Guy Alloucherie, ils se tournent dès 2005 vers une recherche spécifique autour de leur pratique du main à main. Pour eux, les portés sont non seulement une matière à mettre en forme, mais avant tout une relation forte entre deux hommes.

Plus qu’une matière à mettre en forme, le main à main constitue, pour Un Loup pour l’Homme, un véritable langage et un terreau d’étude des relations humaines. La compagnie défend l’art du porté acrobatique comme un art de l’action plutôt que de la démonstration, en rupture avec l’a priori gymnique que l’on peut avoir sur les arts du cirque, un art dans lequel la virtuosité des artistes permet une compréhension sensible de l’homme, pris en tant qu’espèce dans le monde du vivant. La dynamique d’équipe est d’ailleurs souvent poussée par une insatiable curiosité, et l’art de toujours remettre en question ce qui semblait acquis, non pas (ou non plus), pour aller au bout des limites, mais pour étirer l’éventail des possibilités.